L'esprit contre la raison - René Crevel

L'esprit contre la raison

Par René Crevel

  • Date de sortie: 2015-06-09
  • Genre: Classiques
Score: 3.5
3.5
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Description

On le lira de plus en plus et on délaissera les grands noms gonflés de vent de ses ainés qui acceptèrent la pourriture : Ezra Pound. «Crevel, écrivait André Breton en 1952 dans ses Entretiens, avec ce beau regard d'adolescent que nous gardent quelques photographies, les séductions qu'il exerce, les craintes et les bravades aussi promptes à s'éveiller en lui... à travers tout cela c'est l'angoisse qui domine. Il est d'ailleurs psychologiquement très complexe, contrecarré dans une sorte de frénésie qui le possède par son amour du XVIIIe et particulièrement de Diderot. » « Né révolté comme d'autres naissent avec les yeux bleus» écrira Philippe Soupault. René Crevel vient d'apprendre, qu'il souffrait d'une tuberculose rénale alors qu'il se croyait guéri. La nuit suivante, il se suicide au gaz dans son appartement, après avoir griffonné sur un papier « Prière de m'incinérer. Dégoût ». Klaus Mann qui fut un ami proche résuma dans son livre Le Tournant Il se suicida parce qu'il avait peur de la démence, il se suicida parce qu'il tenait le monde pour dément. Extrait : Le « Je pense donc je suis » comme clé de voûte de la franc-maçonnerie individualiste, dans les piètres banlieues de l'intelligence, par milliers se multiplièrent les sordides cahutes où les hommes crurent facile d'oublier l'inquiétude scintillante des étoiles. Bons Raminagrobis qui doutent de tout et de tous, sauf d'eux-mêmes. Mais qu'un philosophe pousse l'outrecuidance jusqu'à traiter de « folle du logis » l'imagination, l'esclavage où d'autres prétendront la réduire n'aura pas été impunément imposé. Le réveil ne saurait se résumer par une simple explosion verbale et le vrai visage romantique ne s'encadre point d'une chevelure grandiloquente, non plus que d'une cravate rouge à hurler. Des silences, quelques gestes, certaines tentations et leurs faisceaux de possibilités, bien mieux que le gilet de Théophile Gautier, prouvèrent de quoi l'homme peut être capable. Un Julien Sorel, par exemple, qui n'a point trouvé son salut dans la froide ambition, par son crime nous montre comment un fait divers devient un fait lyrique. Le jeune homme stendhalien, d'ailleurs, par sa disponibilité désespérée, son impuissance à se contenter des solutions platement humaines, est le type le plus pur de tous ceux que les faillites quotidiennes à jamais ont écartés de l'opportunisme et de ses solutions. De son temps, sans doute n'était-il pas encore de mode de parler d'acte gratuit, mais son exemple déjà nous vaut de savoir que, pour qui veut s'affirmer, rien ne saurait distraire sa pensée de la mort, des sentiments ou des gestes qui la donnent.

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