Pierre Haski révèle le destin et la personnalité de Liu Xiaobo, un héros méconnu qui a eu le courage de défier Pékin.
Le 10 décembre 2010, le prix Nobel de la paix était remis à Oslo à… une chaise vide. Le lauréat, l’intellectuel dissident chinois Liu Xiaobo se trouvait au même moment dans une cellule d’une prison chinoise, purgeant une peine de neuf années d’emprisonnement pour avoir réclamé la démocratie. La vie de Liu Xiaobo épouse la longue et difficile lutte des Chinois pour la démocratie. Une vie qui, comme celle de nombreux autres Chinois, a basculé le 4 juin 1989, avec le massacre de la place Tiananmen, mettant fin, dans le sang, au mouvement des étudiants pour la démocratie. L’intellectuel remuant qu’il était se transforma en activiste, acceptant d’en payer le prix fort. Basé sur de nombreux entretiens avec ses amis et compagnons à différents moments de sa vie, ce livre retrace son parcours, ses idées, ses combats, son attachement à la non-violence résumée par cette phrase qu’il prononce à son procès : « je n’ai pas d’ennemis ». Liu Xiaobo ne recevra jamais son Prix Nobel : il mourra en 2017 d’un cancer du foie. Sans jamais avoir retrouvé la liberté. Un document exceptionnel alors que le Parti communiste chinois s’efforce d’effacer le nom de Liu Xiaobo de la mémoire chinoise.
La biographie d'un homme qu'il ne faut pas oublier, tant il traverse et questionne l'histoire de la Chine. Au fil d’une longue enquête de Taipei à New York en passant par Berlin, ses proches parlent du Liu Xiaobo qu'ils ont connu.
EXTRAIT
Tous deux sont nés dans des familles maoïstes : Xi Jinping dans le sérail du Parti, avec un père dirigeant proche de Mao ; Liu Xiaobo dans le foyer d’un professeur d’université, fervent communiste qui ne remettra jamais en question sa loyauté au Parti, même quand sa « mauvaise origine de classe » lui vaudra d’être puni : sans doute trouvait-il le châtiment légitime. C’est un autre point commun entre les deux hommes : enfants, ils suivront leurs parents dans un exil forcé à la campagne au gré des purges de la révolution culturelle.
Mais le parallèle s’arrête là : Xi Jinping et Liu Xiaobo ont beau sortir de la même « matrice » maoïste, ils suivront des voies séparées et divergentes, leurs destins ne pourraient pas être plus opposés. Xi Jinping est devenu le numéro un du Parti et de l’État chinois en 2012, alors que Liu Xiaobo croupissait déjà en prison, condamné à une peine de onze ans pour « subversion ». Leurs histoires se croisent en 2017, lorsque Liu Xiaobo est diagnostiqué en prison avec un cancer en phase terminale ; inflexible, le pouvoir de Xi Jinping lui refuse le droit d’aller se faire soigner, et vraisemblablement de mourir à l’étranger, en l’occurrence en Allemagne qui a proposé de l’accueillir avec sa famille.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Pierre Haski, né en 1953, est un journaliste dont la longue carrière l’a amené à connaitre personnellement Liu Xiaobo, à l’époque où il était correspondant de Libération en Chine. En 2007, il fonde Rue89, pionnier des sites d’information. Et devient un chroniqueur respecté des affaires internationales, dans le Nouvel Obs ou dans les médias audiovisuels. Il tient depuis 2018 la chronique Géopolitique dans la matinale de France inter, succédant à Bernard Guetta. Il est depuis 2017 président de l’ONG Reporters sans frontières.