À l’aube de sa carrière, un acteur se trouve devant deux miroirs : l’un le réfléchit en roi tragique, l’autre en pitre. S’il choisit le premier, il n’a rien à craindre. Il sera partout reconnu, car la tragédie est notre pain quotidien. Admiré, respecté, le roi se contemplera dans les yeux de son public, et oubliera le miroir. Mais le pitre... le pitre n’est ni reconnu ni respecté. Pour se rassurer, il cherche son reflet dans le miroir, il se rapproche de plus en plus, jusqu’à embuer la vitre de son souffle. Mais les miroirs sont traîtres, on le sait depuis Narcisse, depuis Cocteau. Un pas de plus et le pitre passera de l’autre côté, dans la mort. À chaque époque, on a dit : « Jamais le pitre n’a été si près de la mort », aujourd’hui plus encore. Le pitre agonise. Mais il a la vie dure. Étouffé, miné, gommé, réduit au silence et à l’invisibilité par les cuistres, dans le coma de l’agonie, le pitre répond toujours présent à l’affiche. Après tout, peut-être est-ce un pitre qui sauvera notre pauvre planète... Tendre, triste, tragique, tonnant, tonitruant, tonique, voici Jean Le Poulain dans un nouveau rôle qui fera date, celui d’écrivain.