Karine est une scientifique de la société Cyberzyme, spécialisée dans la biotechnologie. Trop occupée, cela fait longtemps qu’elle se contente de faire son shopping sur Internet.
Julie, à l’inverse, pose dès qu’elle le peut une RTT pour aller faire du lèche-vitrine avec sa meilleure amie, Hélène. Un soir, Hélène, pourtant très peu portée sur les jeux vidéo, surprend Julie en lui prêtant un jeu intitulé Shopping. Révolutionnaire, le programme développé par Cyberzyme suscite l’engouement général. Il s’avère en effet capable d’analyser l’ADN de l’utilisateur pour s’adapter, anticiper ses désirs et réactions et fournir une expérience inoubliable.
Une expérience beaucoup plus marquante, d’ailleurs, que ne l’aurait souhaité Julie...
Extraits :
« Karine Lagoumenie savait avoir contribué à donner naissance à une créature digne de celle de Frankenstein. Elle ne pouvait imaginer, cependant, que le monstre – son propre bébé – en viendrait à la dévorer. Née avec un clavier dans les mains, elle avait très tôt montré des prédispositions pour les matières scientifiques. Son affinité élective avec l’informatique lui avait permis de se faire courtiser, une fois son doctorat de sciences appliquées en poche, par les multinationales les plus prestigieuses. Elle avait pourtant préféré aux Google, Apple et autres Facebook une simple start-up, française qui plus est, du nom de Cyberzyme. Les efforts prodigués dans le domaine de la recherche fondamentale et l’audace que déployait cette start-up à trouver des applications pratiques l’avaient séduite, compensant le maigre salaire. »
« Analyse terminée », la prévint un message sonore au milieu de sa troisième partie. Elle quitta le Solitaire et double cliqua sur l’icône d’un sac à main apparue sur son bureau. Bien que son ordinateur ne fût pas de la dernière fraîcheur, le chargement fut cette fois assez rapide. Un personnage 3D en rotation se matérialisa. Elle n’avait chargé aucune photo d’elle, ce qui rendait la ressemblance physique d’autant plus troublante. La figure à l’écran aurait pu être celle d’une sœur qu’elle n’avait jamais eue, mélange entre ses traits à elle – notamment le front, le nez et les oreilles – et ceux de sa mère pour les joues plus creuses que les siennes et le menton un peu plus large. La caméra prit du champ. Les seins de l’avatar étaient peut-être un peu plus rebondis, ses fesses plus galbées, mais le graphisme s’avérait d’une précision hallucinante. A sa stupeur, elle reconnut des grains de beauté à l’emplacement exact de certains des siens.
Elle donna un nom à son avatar.
Une voix suave masculine la salua et l’invita à le suivre. Elle se mit à bouger la souris d’après les indications de flèches qui apparaissaient et s’évanouissaient tout aussi soudainement. Son personnage virtuel, même nu, se mouvait avec une grâce ensorcelante. Si les boutiques que lui fit visiter le programme avaient un aspect extérieur assez sommaire, les vêtements, chaussures et accessoires à l’intérieur révélaient des couleurs, des motifs et un design qu’elle n’avait jamais vus ailleurs. »