La mondialisation est avant tout urbaine. Devenue un gigantesque accélérateur de trajectoires individuelles, soumise aux impératifs de la vitesse, la ville des flux perd progressivement son attache avec le territoire. Elle oscille ainsi entre les friches urbaines des non-lieux que les flux contournent – les favelas de Rio ou São Paulo, les bidonvilles de Kinshasa et de Johannesburg – et le paroxysme de la communication des hyperlieux branchés sur les réseaux, où s’affichent les signes d’une modernité agressive et insolente – comme à Singapour, Doha ou Dubaï. Y a-t-il encore une place pour l’émergence de milieux qui cherchent à soumettre ces flux à l’exigence anthropologique de l’habiter, ainsi qu’à celle, politique, de l’agir ensemble – comme le symbolisent désormais la place Tahrir du Caire ou la place Taksim d’Istanbul ? Pour déjouer les projections fonctionnalistes des architectes-urbanistes ainsi que les tentatives de planification des édiles et des aménageurs, pour résister aux nostalgies patrimoniales comme aux séductions des images futuristes, il faut être sensible aux pouvoirs de l’informel, celui des quartiers tremplins qui font des migrants les inventeurs de nouvelles pratiques urbaines, comprendre les raisons de l’attractivité des façades maritimes et des ports, et entendre l’enchevêtrement des récits de la ville invisible. Olivier Mongin nous propose un panorama magistral des évolutions contemporaines de la ville et de la diversité des scénarios urbains, en nourrissant ses réflexions des réalisations des architectes et urbanistes, mais aussi des fulgurances des cinéastes