Ce petit livre aigu et dérangeant ne prétend pas à la rigueur de l’écrit. Il se fait l’écho d’une liberté de ton et de parole telle qu’elle s’exprima, pendant toute une semaine, sur l’antenne de France Culture. Les deux interlocuteurs qui dialoguent ici interprètent différemment l’effondrement du communisme, le recul de l’État-nation, la « mondialisation » culturelle ou économique, pour ne citer que ces exemples. Mais une même exigence les réunit : le refus de consentir aux molles facilités du « prêt-à-penser » contemporain. Régis Debray et Jean Ziegler ont longtemps partagé, chacun à sa façon, les mêmes espérances et les mêmes engagements. Au-delà de leurs divergences avérées et qu’on retrouvera mises au clair sans dérobades, ils se reconnaissent néanmoins, l’un comme l’autre, dans ces vers du grand poète turc Nazim Hikmet qui donne leur titre à ces « conversations » : l’air est lourd comme du plomb Je crie, je crie, je crie, je crie. Être captif, là n’est pas la question Il s’agit de ne pas se rendre.