Comment connaître Dieu? Est-il légitime de faire de son essence l’objet de la méthode, d’appliquer à sa nature et à ses attributs les modes de connaissance définis par cette méthode, à savoir l’induction, la déduction voire l’intuition? Comment défendre la possibilité d’une intellection claire et distincte de l’essence de Dieu, telle que la représente son idée, et faire droit à l’incompréhensibilité attachée à son infinité? Le paradoxe de la métaphysique cartésienne consiste à la fois à revendiquer la possibilité de connaître Dieu à partir de son essence, selon la « vraie définition » qu’en donne son idée innée, et à poser l’incompréhensibilité de cette essence, irréductible à ce que la raison peut en déterminer. C’est sur ce paradoxe que s’élaborent une « science parfaite » de Dieu et un traité de ses attributs, que Descartes déclare avoir tous « expressément prouvés ».
Le Dieu de la métaphysique n’est toutefois pas seulement objet de science; il suscite aussi la plus « violent des passions » : sa connaissance et la preuve de tous ses attributs n’ont en effet d’autre utilité que de nous conduire à son amour, lequel procure des « satisfactions » et « des contentements qui valent incomparablement davantage que nos petites joies passagères »..
Laurence Devillairsdocteur en philosophie, enseigne au Centre Sèvres et à l'Institut catholique de Paris.