Quelle est la règle de droit et d'intérêt qui, dans les sociétés de type arriéré ou archaïque, fait que le présent reçu est obligatoirement rendu ? Quelle force y a-t-il dans la chose qu'on donne qui fait que le donataire la rend ?
Considéré comme le père de l'anthropologie française, Marcel Mauss introduit dans cet essai la notion de "fait social total", les échanges et plus particulièrement le don y étant ainsi conçus comme un phénomène social qui recouvre à la fois une dimension économique, politique, religieuse et culturelle.
C'est dans son Essai sur le don -- toujours actuel près d'un siècle après sa publication -- que sa notion de "fait social total" revêt sa forme la plus élaboré. Il y traite notamment du concept de mana, c'est-à-dire d'une force qui contient le Sacré et qui est pour lui présente dans toutes les formes archaïques de don et d'échange. Que ce soit dans le processus d'accumulation et de destruction de biens (le potlatch des populations indigènes d'Amérique du Nord) ou dans les échanges de dons de l'aire polynésienne (le kula décrit par Bronislaw Malinowski), il s'agit d'identifier "quelle force présente dans l'objet donné pousse le donateur à le rendre". Cette force n'est pas une valeur matérielle ni économique, elle est en elle-même la raison d'être de l'échange fondamental qui se fait avec les esprits des morts et des dieux. Outre son apport incontournable aux sciences sociales, l'Essai sur le don influencera nombre d'intellectuels et d'écrivains comme entre autres Claude Lévi-Strauss, Roger Caillois, Georges Bataille,...